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Dans la réalité, Ann Clayborne se révéla aussi ratatinée et boucanée que Russell, mais plus silencieuse et plus bizarre encore : acerbe, laconique, soupe au lait. Elle se présenta au dernier moment avec, pour tout bagage, un sac à dos et un bloc-poignet noir, extraplat, dernier modèle. Sa peau acajou était pleine de kystes, de verrues et de cicatrices aux endroits où elle s’en était déjà fait enlever. Une longue vie passée en plein air, au début surtout, quand le bombardement d’UV était intense. Bref, elle était archicuite. Carbonisée, comme ils disaient à Echus. Elle avait les yeux gris, une bouche de lézard, réduite à une fente, et les rides qui reliaient ses narines aux commissures de ses lèvres semblaient taillées à la machette. Aucun visage n’aurait pu être plus sévère que celui-ci.
Elle passa toute la semaine que dura le voyage vers Jupiter dans le petit parc du vaisseau, à marcher entre les arbres. Zo préférait la salle à manger et le grand dôme panoramique où un petit groupe se réunissait le soir pour avaler des cachets de pandorphe, jouer au go ou fumer de l’opium en regardant les étoiles. Elle vit donc très peu Ann à l’aller.
Ils survolèrent la ceinture des astéroïdes, légèrement hors du plan de l’écliptique, et il est probable qu’ils passèrent sans les voir au-dessus de plusieurs petits mondes évidés. Les patatoïdes rocheux qui traversaient les écrans du vaisseau pouvaient receler de somptueuses villes paysagées ou des coquilles vides s’il s’agissait de mines épuisées ; des sociétés anarchiques et dangereuses, d’autres peuplées par des groupes religieux ou des communautés utopiques, plus ou moins pacifiques. L’existence d’une telle variété de systèmes, coexistant dans un état semi-anarchique, amenait Zo à douter que Jackie réussisse jamais à rallier les satellites extérieurs sous la bannière martienne. Elle avait plutôt l’impression que la ceinture des astéroïdes préfigurait l’organisation politique de tout le système solaire. Mais Jackie n’était pas d’accord. La ceinture des astéroïdes était comme elle était, disait-elle, à cause de sa nature particulière, dispersée sur une large bande tout autour du soleil. Les satellites extérieurs, quant à eux, étaient regroupés autour de leurs géantes gazeuses. Il fallait s’attendre à les voir se liguer entre eux. Et il y avait des mondes si vastes, par rapport aux astéroïdes, que bien des choses dépendraient des alliances qu’ils concluraient dans le système intérieur.
Zo n’était pas convaincue. Mais elle aurait l’occasion de mettre les théories de Jackie à l’épreuve dans le système jovien, où ils commençaient à décélérer. Le vaisseau traversa l’espace galiléen, ce qui le ralentit encore et leur permit de voir les quatre grosses lunes de près. Elles faisaient toutes les quatre l’objet de projets de terraforming ambitieux, en cours d’application. Les conditions de départ étaient similaires sur les trois plus lointaines, Callisto, Ganymède et Europe, qui étaient couvertes de couches d’eau glacée, Callisto et Ganymède sur mille kilomètres de profondeur, Europe sur cent kilomètres. L’eau n’était pas rare dans le système solaire extérieur, mais elle n’était pas très fréquente non plus, de sorte que ces petits mondes avaient quelque chose à monnayer. De grandes quantités de roche étaient éparpillées à la surface glacée des trois lunes, des restes d’impact météorique pour l’essentiel, un gravier de chondrite carbonée qui constituait un matériau de construction très utile. Lors de leur arrivée, une trentaine d’années martiennes auparavant, les colons des trois lunes avaient fondu les chondrites et construit des armatures de tente en nanotube de carbone – le matériau dont était fait le câble de l’ascenseur spatial martien –, et tendu dessus des bâches multicouches de vingt ou trente kilomètres de diamètre. Sous ces tentes, ils avaient répandu de la roche broyée pour créer une mince couche d’humus – le dernier cri du permafrost – entourant en certains endroits des lacs de glace fondue.
La ville-tente construite selon ce modèle sur Callisto s’appelait Lake Geneva. C’est là que les délégués martiens devaient rencontrer les chefs et groupes politiques de la Ligue jupitérienne. Comme d’habitude, Zo faisait de la figuration en guettant l’occasion de transmettre le message de Jackie aux gens susceptibles de servir ses fins.
Cette rencontre entrait dans le cadre des réunions semestrielles au cours desquelles les Jupitériens discutaient du terraforming des galiléennes. Le contexte se prêtait donc particulièrement à l’expression des intérêts de Jackie. Zo se posta au fond de la pièce, à côté d’Ann, qui avait décidé d’assister aux entretiens. Les problèmes techniques posés par le terraforming de ces lunes étaient considérables par le volume, mais simples dans leur principe. Callisto, Ganymède et Europe recevraient au départ le même traitement : des réacteurs à fusion mobiles circulaient à la surface, réchauffant la glace et renvoyant les gaz dans l’atmosphère primitive d’hydrogène et d’oxygène. Ils espéraient créer ainsi des ceintures équatoriales constituées de roches broyées afin de créer un sol sur la glace. La température atmosphérique resterait proche de la glaciation, afin que les écologies de toundra puissent être établies autour d’une chaîne de lacs équatoriaux, dans une atmosphère respirable composée d’oxygène et d’hydrogène.
Io, la plus proche des galiléennes, posait un problème plus complexe, mais plus intéressant. Des lanceurs y projetaient d’énormes missiles de glace et de chaldates depuis les trois autres grosses lunes. Très proche de Jupiter, elle n’avait que très peu d’eau, sa surface était constituée de couches de basalte entrelardé de soufre, lequel jaillissait à la surface en volutes volcaniques spectaculaires, chassées par l’attraction de Jupiter et des autres galiléennes. Le terraforming d’Io prendrait plus de temps que la moyenne, et reposait en partie sur l’infusion de bactéries mangeuses de soufre dans les sources sulfureuses bouillantes qui entouraient les volcans.
Tous ces projets étant freinés par le manque de lumière, on construisait des miroirs spatiaux d’une taille phénoménale aux points de Lagrange de Jupiter, où les champs gravitationnels du système jovien étaient moins complexes. Ces miroirs dirigeraient la lumière solaire vers l’équateur des quatre lunes. Elles présentaient toujours la même face à Jupiter, en raison du freinage exercé par les forces de marée de la planète. Leur rotation sur elles-mêmes avait une durée identique à celle de leur révolution autour de Jupiter, de sorte que la durée de leur jour dépendait de la longueur de leur orbite autour de Jupiter, qui allait de quarante-deux heures pour Io à quinze jours pour Callisto. Quelle que soit la longueur de leur journée, elles ne recevaient que quatre pour cent de l’ensoleillement de la Terre, mais la quantité de soleil qui frappait la Terre était excessive. Quatre pour cent faisait en fait beaucoup de lumière, en terme de visibilité – c’était dix-sept mille fois plus que la pleine lune sur Terre –, mais peu de chaleur pour le terraforming. Ils s’ingéniaient donc à capturer l’énergie solaire par tous les moyens possibles. Lake Geneva et toutes les colonies des autres lunes étaient situées face à Jupiter, pour profiter de la lumière réfléchie par ce globe géant, et des lanternes à gaz avaient été placées dans la stratosphère de Jupiter. Elles brûlaient un peu de l’hélium de la planète. Après ces brûleurs, des disques réfléchissants électromagnétiques furent positionnés de façon à renvoyer la lumière dans le plan de l’écliptique de la planète. La vision de la monstrueuse balle rayée était plus spectaculaire que jamais avec la vingtaine de points lumineux qui parcouraient sa surface, trop intenses pour qu’on les regarde plus d’une seconde.
Malgré les miroirs spatiaux et les lanternes à gaz, les colonies recevraient moitié moins de lumière solaire que Mars, mais on n’y pouvait rien. C’était la vie dans le système solaire extérieur, une affaire plutôt ténébreuse, tout bien considéré, se disait Zo. Encore ce piètre résultat exigerait-il la mise en place d’une impressionnante infrastructure. C’est là que la délégation martienne entrait en jeu. Jackie était prête à leur proposer beaucoup d’aide : des réacteurs à fusion, des lanternes à gaz et l’expérience martienne dans le domaine des miroirs spatiaux et du terraforming, celle-ci devant être fournie par une association de coops aérospatiales désireuses d’entreprendre de nouveaux projets, maintenant que la situation dans l’espace martien était à peu près stabilisée. Elles devaient apporter des capitaux et leur technique en échange d’accords commerciaux préférentiels, de fourniture d’hélium recueilli dans la stratosphère de Jupiter, et de l’autorisation d’explorer et d’exploiter les dix-huit petites lunes de Jupiter, voire de participer aux efforts de terraforming sur ces lunes.
Des capitaux, de l’expérience, des échanges ; c’était la carotte, et elle était grosse. Il était clair qu’en mordant à l’appât les Galiléens acceptaient le principe d’une association, que Jackie pourrait ensuite faire suivre d’alliances politiques de tout poil, pour attirer les lunes de Jupiter dans sa sphère d’influence. Cela dit, c’était clair aussi pour les Jupitériens, et ils s’efforçaient d’obtenir le maximum en donnant le minimum en échange. On pouvait être sûr qu’ils feraient bientôt de la surenchère avec les ex-métas et autres organisations terriennes.
C’est là que Zo intervenait. Elle était le bâton. La carotte publique, le bâton privé. Telle avait toujours été la méthode de Jackie, en toutes circonstances.
Zo distilla les menaces de Jackie au compte-gouttes (elles n’en paraissaient que plus redoutables). Elle eut un bref entretien avec les délégués d’Io. Le projet écopoétique, lâcha-t-elle incidemment, était beaucoup trop lent. Les bactéries mettraient des milliers d’années à changer le soufre en gaz utiles, et d’ici là le champ radio intense de Jupiter, qui enveloppait Io et décuplait ses problèmes, les ferait si bien muter qu’elles deviendraient méconnaissables. Ils avaient besoin d’eau, d’une ionosphère, peut-être même de placer la lune sur une orbite plus haute autour de leur grand dieu de gaz. Mars, la capitale du terraforming, la civilisation la plus saine, la plus riche du système solaire, pouvait les aider dans tous ces domaines, leur apporter un appui spécifique. Ou même proposer aux autres galiléennes d’être les maîtres d’œuvre du projet afin de lui faire prendre de la vitesse.
Après ça, elle eut des conversations informelles avec différents délégués des lunes de glace : dans les cocktails qui suivaient les réunions, dans les bars après les cocktails, et à la sortie des bars, quand les délégués flânaient par petits groupes le long de l’illustre promenade de Lake Geneva, sous les lampadaires sono-luminescents accrochés à l’armature de la tente. Les délégués d’Io, leur dit-elle, cherchaient à conclure un accord séparé. Tout bien considéré, leur situation était la plus prometteuse : ils avaient un sol sur lequel se tenir debout, de la chaleur, des métaux lourds, un fort potentiel touristique. Zo insinua qu’ils semblaient prêts à utiliser ces avantages pour jouer leur carte et faire éclater la Ligue jupitérienne.
Zo laissa Ann assister à quelques-unes de ces conversations, curieuse de voir ce qu’elle en tirerait. Ann les accompagna donc sur la promenade du lac, qui longeait le bord du cratère météorique inférieur contenant le lac. Les cratères d’éclaboussement de cet endroit surpassaient tous ceux de Mars, et de loin. Le bord glacé de celui-ci n’était qu’à quelques mètres au-dessus du niveau moyen de la lune. De sa lèvre ronde on pouvait contempler l’eau du lac, les rues plantées d’herbe de la ville, ou, au-delà de la tente, la plaine de glace accidentée qui s’incurvait vers l’horizon tout proche. L’extrême platitude du paysage hors de la tente donnait une indication de sa nature : un glacier couvrant un monde entier, sur mille kilomètres de profondeur, de la glace qui dévorait les impacts météoriques et lissait les fentes causées par les forces de marée.
De petites vagues noires formaient des schémas d’interférence à la surface plane du lac. L’eau était blanche comme la glace du fond, mais teintée de jaune par Jupiter qui les dominait tel un gros ballon aplati d’un côté. Des tourbillons étaient visibles à la limite entre les bandes orange ou d’un jaune crémeux, de même qu’autour des points brillants des lanternes.
Ils passèrent devant une rangée de bâtiments en bois. Le bois venait des forêts plantées sur les îles qui flottaient, pareilles à des radeaux, de l’autre côté du lac. L’herbe des rues était vert émeraude. Derrière les bâtiments, de véritables jardins poussaient dans d’immenses bacs, sous de longues lampes éblouissantes. Tout en marchant, Zo montra un bout du bâton à leurs compagnons, des fonctionnaires troublés de Ganymède ; elle fit allusion à la puissance militaire de Mars, insinua à nouveau qu’Io envisageait de se désolidariser de la Ligue.
Les Ganymédiens allèrent dîner, l’air un peu abattus.
— Que de subtilité, commenta Ann quand ils furent hors de portée de voix.
— Vous êtes bien sarcastique, ironisa Zo.
— Et vous, vous n’êtes qu’une tueuse à gages.
— Je devrais peut-être m’inspirer de la subtile diplomatie Rouge. Ou mieux, demander qu’on m’envoie du monde pour faire sauter deux ou trois trucs ici.
Ann fit entendre un bruit obscène. Elle poursuivit son chemin, et Zo lui emboîta le pas.
— Ça me fait drôle que la Grande Tache Rouge ne soit plus là, nota Zo alors qu’elles arrivaient à un pont enjambant un canal au fond blanc. On dirait une sorte de signe. Je m’attends toujours à la voir reparaître.
L’air était froid et humide. La population était surtout d’origine terrienne, une partie de la diaspora. Des hommes-oiseaux décrivaient des spirales langoureuses dans le ciel, près de l’armature de la tente. Zo les regarda traverser le disque de la grande planète. Ann s’arrêtait tous les trois pas pour examiner les parois de roche taillée, ignorant la ville posée sur la glace et sa population, la grâce aérienne et les vêtements aux couleurs de l’arc-en-ciel d’une bande de jeunes indigènes qui passaient auprès d’elles en courant comme des lévriers.
— Vous vous intéressez vraiment plus aux pierres qu’aux gens, remarqua Zo avec un mélange d’admiration et d’irritation.
Ann la regarda. De vrais yeux de basilic ! Mais Zo haussa les épaules, la prit par le bras et l’entraîna.
— Ces jeunes indigènes ont moins de quinze années martiennes. Toute leur vie ils ont vécu sous une gravité de 0,10 g. Ils se fichent pas mal de Mars ou de la Terre. Ils croient aux lunes de Jupiter, à l’eau, ils croient au fait de nager et de voler. Leur vue s’est adaptée à la faible luminosité. Certains commencent à avoir des branchies. Ils ont pour ces lunes un projet de terraforming qui leur prendra cinq mille ans. C’est la prochaine étape de l’évolution, et vous, pour l’amour de Ka ! vous êtes là, à regarder des cailloux qui sont exactement pareils que partout ailleurs dans la galaxie. Vous êtes vraiment dingue !
Cela ricocha sur Ann comme un galet sur l’eau.
— J’ai l’impression de m’entendre parler quand j’essayais d’arracher Nadia à Underhill, dit-elle.
Zo haussa les épaules.
— Venez. J’ai une autre réunion.
— La mafia ne se repose jamais, hein ?
Mais elle la suivit en regardant autour d’elle. Une naine dans une drôle de combinaison. Ou un bouffon de cour ratatiné.
Quelques membres du conseil de Lake Geneva les saluèrent avec un soupçon de nervosité, près des quais. Ils prirent un petit ferry, qui louvoya entre les bateaux à voile. Le vent soufflait fort sur le lac. De grands tecks, des ochromes, se dressaient sur le paillasson marécageux qu’était le sol chauffé de l’île flottante. Sur le rivage, les bûcherons s’activaient devant une petite scierie. Malgré l’isolation phonique, le gémissement assourdi des scies accompagnait toutes les conversations. Flottant sur un lac, sur une lune de Jupiter, l’éloignement du soleil imprimant une sorte de grisaille à toutes les couleurs : Zo éprouvait de petites vagues d’ivresse comme lorsqu’on volait, et elle le dit aux indigènes.
— C’est vraiment magnifique ! Je comprends que des gens pensent à faire d’Europe un monde marin, avec de l’eau partout. Ils pourraient même en envoyer vers Vénus. En s’abaissant, le niveau de l’eau découvrirait des îles. Je ne sais pas s’ils vous en ont parlé. Ce ne sont peut-être que des idées en l’air comme celle qui consisterait à créer un petit trou noir et à le laisser tomber dans la stratosphère de Jupiter. Stellariser Jupiter ! Vous auriez toute la lumière que vous voudriez, du coup !
— Mais Jupiter ne serait pas consumée ? demanda l’un des autochtones.
— Bah, ça prendrait un moment. On parle de plusieurs millions d’années.
— Et ça finirait dans une nova, souligna Ann.
— C’est vrai. Tout disparaîtrait, sauf Pluton. Enfin, d’ici là, c’est nous qui aurons disparu depuis longtemps. Et puis, ils trouveront bien quelque chose.
Ann eut un rire rauque. Les autres, plongés dans leurs pensées, ne semblèrent pas l’entendre.
Ann et Zo regagnèrent la rive du lac et poursuivirent leur promenade.
— On vous voit venir, avec vos gros sabots.
— C’est très malin, au contraire. Ils ne savent pas si je parle pour moi, pour Jackie ou pour Mars. Ou pour ne rien dire. Mais ça leur rappelle le contexte général. Il leur serait trop facile de se laisser emporter par la situation de Jupiter et d’oublier tout le reste. Le système solaire dans son ensemble, en tant qu’organisme politique unique. Les gens n’arrivent pas à conceptualiser ça ; il faut les aider à s’en souvenir.
— C’est vous qui auriez bien besoin d’aide. Ce n’est pas l’Italie de la Renaissance, vous savez.
— Machiavel est toujours d’actualité, si c’est ce que vous voulez dire. Et ils ont besoin qu’on le leur rappelle ici.
— Vous me rappelez Frank.
— Frank ?
— Frank Chalmers.
— Voilà un issei que j’admire, convint Zo. Ce que j’ai lu sur lui, en tout cas. C’était le seul de vous tous qui n’était pas hypocrite. Et c’est lui qui a fait le plus de choses.
— Vous n’y connaissez rien, lâcha Ann.
Zo haussa les épaules.
— Le passé est le même pour nous tous. J’en sais aussi long que vous sur la question.
Un groupe de Jupitériens passa. Des hommes pâles, aux yeux immenses, absorbés dans leur conversation. Zo fit un geste :
— Regardez comme ils sont concentrés. Je les admire, vraiment. Se jeter à corps perdu dans un projet qui n’aboutira que longtemps après leur mort… C’est une attitude absurde, un geste de défi et de liberté, une divine folie. On dirait des spermatozoïdes se tortillant follement vers un but inconnu.
— Comme nous tous, fit Ann. C’est l’évolution. Bon, et Miranda, quand est-ce qu’on y va ?